26 février 2020

QUÉBEC : NOUVELLES CONSÉQUENCES EN PRÉSENCE DE LA RGAE OU D’UN TROMPE-L’OEIL

PÉNALITÉ RGAE

Revenu Québec peut imposer des pénalités monétaires aux contribuables ou à leurs promoteurs visés par une cotisation basée sur la règle générale anti-évitement (RGAE) québécoise. Une cotisation basée uniquement sur la RGAE fédérale n’est pas visée par ces pénalités. D’une part, le contribuable parti à une opération d’évitement abusive encourt une pénalité égale à 50 pour cent de l’avantage fiscal supprimé alors que, d’autre part, son promoteur est susceptible de se voir imposer une pénalité égale à 100 pour cent des honoraires reçus relativement à l’opération visée par la RGAE (la « pénalité RGAE »). La divulgation préventive de l’opération via le formulaire TP-1079.DI permet d’éviter la pénalité RGAE.

AIl convient de préciser que la qualification de promoteur en vertu de la Loi sur les impôts (Québec) (LI) diffère de celle en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada). Plus particulièrement, le promoteur d’une opération d’évitement correspond à toute personne, y compris une société de personnes, qui répond aux conditions cumulatives suivantes :

• elle a commercialisé l’opération d’évitement ou fait sa promotion ou soutenu autrement sa croissance ou l’intérêt qu’elle suscite;
• elle (ou une personne ou une société de personnes à laquelle elle est associée ou liée) a reçu ou a le droit de recevoir, directement ou indirectement, une contrepartie pour cette commercialisation, cette promotion ou ce soutien; et
• il est raisonnable de conclure qu’elle aura exercé un rôle important dans cette commercialisation, cette promotion ou ce soutien.

PÉNALITÉ TROMPE-L’OEIL

Le projet de loi 42, Loi donnant suite à des mesures fiscales annoncées à l’occasion du discours sur le budget du 21 mars 2019 et à certaines autres mesures, récemment déposé à l’Assemblée nationale du Québec, prévoit notamment de nouvelles pénalités pour les contribuables participants à des stratagèmes basés sur un trompe-l’œil ainsi que les conseillers ou promoteurs de tels stratagèmes. Plus particulièrement, le contribuable encourt une pénalité correspondant au plus élevé de vingt-cinq-mille dollars et de 50 pour cent de l’impôt supplémentaire qu’il aurait eu à payer pour cette année, n’eût été trompe-l’œil. Le promoteur ou conseiller du trompe-l’œil encourt quant à lui une pénalité correspondant à 100 pour cent des honoraires reçus relativement à cette opération (la « pénalité trompe-l’œil »). Contrairement à la pénalité RGAE, la pénalité trompe-l’œil s’étend également aux « conseillers ». Ce terme vise toute personne ou société de personnes qui fournit de l’aide, de l’assistance ou des conseils relativement à la conception ou à la mise en œuvre de l’opération, ou qui la commercialise ou en fait la promotion.

Il convient de noter que le terme « trompe-l’œil » n’est pas défini dans LI. Il importe donc de se référer à la définition développée dans la jurisprudence pertinente. Toutefois, l’intention de tromper les autorités fiscales est généralement commune à toutes les parties à l’opération et constitue une des caractéristiques des stratagèmes comportant un trompe-l’œil. Incidemment et contrairement à la pénalité RGAE, il ne sera pas possible d’éviter l’application de la pénalité trompe-l’œil via une quelconque divulgation de l’opération.

REGISTRE DES ENTREPRISES NON ADMISSIBLES

En sus de ce qui précède, avec le projet de loi 37, Loi visant principalement à instituer le Centre d’acquisitions gouvernementales et Infrastructures technologiques Québec, et le projet de loi 42, le gouvernement québécois entend inscrire les contribuables ainsi que les promoteurs ou les conseilleurs, selon le cas, sujets à une cotisation finale basée sur l’une des pénalités susmentionnées sur le registre des entreprises non admissibles (RENA). Ce registre est régi par la Loi sur les contrats des organismes publics (LCOP). Un contribuable, un promoteur ou un conseiller, selon le cas, inscrit au RENA ne pourra présenter une soumission pour la conclusion d’un contrat public, conclure un tel contrat, ni conclure un sous-contrat public. Cette inadmissibilité dure cinq ans. Une cotisation finale correspond à une cotisation à l’égard de laquelle tout délai pour s’opposer est échu ou, en présence d’une opposition ou d’un appel auprès d’un tribunal compétent, cette opposition ou cet appel, selon le cas, est réglé de façon définitive.

De manière générale, les marchés publics comprennent les contrats de service ou de construction des ministères et organismes de l’Administration gouvernementale, des organismes du réseau de l’éducation, des organismes du réseau de la santé et des services sociaux, les sociétés d’État ainsi que les villes et les organismes municipaux. Cette liste est loin d’être exhaustive alors que l’on comptait 288 organismes publics assujettis à la LCOP au 31 mars 2018.

La commission d’une infraction prévue au RENA par un contribuable, un promoteur ou un conseiller, selon le cas, engendre des conséquences pour les personnes qui lui sont liées (tel que l’entend la LCOP). D’une part, si un administrateur ou un dirigeant d’une compagnie est reconnu coupable d’une infraction prévue au RENA et que cette infraction a été commise dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, ladite compagnie se voit également inscrite sur ce registre. De plus, lorsque l’associé d’une société de personnes ou l’un de ses autres dirigeants se voit inscrit au RENA en raison de sa participation dans une opération sujette à l’une ou l’autre pénalité, la société de personnes se voit également frappée d’une interdiction de participer aux marchés publics. En sus, une personne exerçant le contrôle de jure d’une compagnie reconnue coupable d’une infraction prévue inscrit également cette entreprise au RENA indépendamment du fait que l’infraction ait été commise ou non dans le cadre de l’exercice de ses fonctions. D’autre part, suivant le refus ou la révocation de l’autorisation de contracter d’une entreprise, les personnes dont elle exerce le contrôle de jure sont également inscrites sur le RENA.

RAPHAEL BARCHICHAT, LL.B., LL.M., JD, LL.M. Fiscalité
Associé, fiscalité
T. 514-341-5511 x. 246 / rbarchichat@psbboisjoli.ca

JÉRÉMIE CAILLÉ, LL.B., M. Fisc.
Conseillr en fiscalité
T. 514-341-5511 x. 449 / jcaille@psbboisjoli.ca

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*Texte initialement publié sur le site de la Fondation canadienne de fiscalité et disponible en cliquant ici.
Canadian Tax Focus
Volume 10, Numéro 1, Février 2020
©2020, Fondation canadienne de fiscalité

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